mardi 16 octobre 2012

DES EAUX FORTES

DES EAUX FORTES



Je suis soufre à moi-même
Et les feuilles en ont
La couleur

Froid hors de mes cordes
Je résonne souvent de chaudes
Insomnies
Et l’azur me fond – il me fend

Plus aucune prière ne monte
Dans mon ciel sans étoiles

Au plus vif de ma douleur
Colère me réunit
Contre mes propres monstres
Et contre le plus froid
Qui voudrait
Me séparer

L'Etat m’est un vestige
Nécessaire qui résonne
Comme un coffre-fort
Sur lequel  frappent
De grands cris

Pour eux je grime
Une face cruelle
Des deux côtés
De ma moustache grise

Mais je mords l’injustice
Et déglutie sa parole
De bouffon singe -
Sans régner sur ma misère
Je me fabrique une royauté
D’insoumis

Sur mon rocher des fées
Tout un soleil attache son feu –
Arraché à la distance
Mon amour ne suinte pas
La tristesse -
De son alambic – débordent
Des eaux fortes
Qui me jettent dans
Un vivant portrait

D’un souffle – j’ai cramé
Tous les fagots de
La Saint Jean
Et les cendres – je les ai
Jetées au carrefour
De toutes les promesses
Vaines

Non féal – mon amour reste
Dans ce souffle où passent
Des matines fécondes
Et des rêves vespéraux
Tous ramassés
En péninsule

Tant j’ai effeuillé et égrené
Mon temps qu’il reste
En branches nues
Auréolées d’instants – quoi ? Lumineux !

Désir en proie aux farandoles érotiques
Que ne te dresses-tu pas
Dans la danse des
Souvenirs
Qui s’enrôle dans la robe
De la mémoire ?
Qui soupire aux hachures
Du temps ?

Nul habit brillant
N’est trace de nouveauté
Et l’automne fleurit encore
De ses couleurs
A la fenêtre de mes songes

Je sais l’automne …
J’emporterai tout
Sans-même une ultime prière
Quand la mort cavalière
Se dressera sur mon corps atone

Non ! Qu’une seule aurore
Puisse m’accompagner
Au creux labyrinthique
De mes fins
Qu’elle soit une ultime – comme
Actuelle jubilation
Devant les éclats ramassés
Du monde
Par les miséreux
Les souffreteux
Les pâles sans teint …

Je l’attraperai au-delà
De mon dernier désastre
Et je volerai – sans-cesse
Plus avant le temps fuyant
Et deshérent où hurle
La vitesse

Et le soufre de mon souffle
Brûlera encore et encore
Les épines séparées
Des roses émues
Par le sang
Du poète

Laissez – Laissez !
Ma chair  est un désir volubile
Arraché à l’azur
Sur le montant
De mes paupières

Et l’on  n’enlèvera pas
Les larmes perlées
Sur le visage jauni
De l’automne

Que le sens ressuscite
Avec le vent
Je le porte avec
Toutes les feuilles
Qui volent
Au hasard

Mon âge n’est pas victimaire
Et il s’abroge ce droit absolu
Qui devrait appartenir
A tout étranger
Revenu de
Toutes les guerres
De tous les désastres
De tous les exils
Et de toutes les servitudes
Volontaires

Notre terre est une issue sans fin
Où le pays cherche encore son ombre
Non ! Plus de vaisseau pour accoster
Sur nos rives – ne vient
En vainqueur
Ni en parvenu !

Ah ! Que mon cœur batte
Aux pulsations du pauvre
Et arrache les plus petits
Moignons de réel
De l’enfance
Du monde
A venir
Qui fleurira sur
Les plus humbles pas
De la vertu !...

Pourquoi l’ombre ne piocherait-elle pas
Dans la lumière
Ses sarments
Ses sources
Qui moissonnent
Dans les murs ?

La dernière grande pierre
Jetée au gouffre
Du hasard
Je la chaufferai
Aux édifices du poème
Sans attendre qu’un dieu
La fonde en or
Pour les veaux
De la morale

Les nuits mortes pour rien
Qui les glacera sous
Les aruspices
Qui prévoient
D’ « infantiles » - « infécondes »
Et « inutiles »
Cultures de la
Liberté ?

Y a-t-il encore poésie
Pour glaner encore
Des vœux
Au ventre
Des vampires ?

Non ! Plus aucun appel
Ne résonnera dans
Cet abîme !
Et nous qui clamons
La lueur
Nous la tenons pour tous
Et pour personne –
Affranchis ainsi de
Toute exclusivité

Pour le meilleur – Qu’elle trace
Son propre chemin
Sans bornes indicatrices
Ni signaux de détresse …
Voilà le poème qui monte
A mon souffle avec
Un soufre de nouveau
Projeté !

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